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À Marseille, 2700 morts prématurés par an à cause des particules fines

La mortalité liée à la pollution de l’air serait responsable de 8.8 millions de morts chaque année dans le monde, selon une récente étude de la société européenne de cardiologie. Loin d’être épargnée, la cité phocéenne est même la ville française la plus touchée par le phénomène des particules fines. La faute aux voitures, aux bateaux et à l’industrie pétrochimique.
Le trafic routier est la principale cause de la pollution aux particules fines à Marseille. ©Pixabay.com

800 000 personnes meurent prématurément chaque année en raison de la pollution atmosphérique en Europe, d’après une étude publiée par le European Heart Journal le 12 mars. C’est deux fois plus que les estimations de l’Organisation Mondiale de la santé. Le principal danger réside dans les particules fines, capables d’infiltrer notre organisme jusqu’à notre système cardiaque. Les maladies cardiovasculaires engendrées par cette pollution seraient à l’origine de 40% à 80% des décès.

250 000 Marseillais exposés à des taux d’émissions polluantes supérieurs à la limite européenne

Ce danger se retrouve à tous les échelons. L’organisme régional de surveillance de la qualité de l’air Atmo Sud (anciennement Air PACA), association agréée par le ministère de l’écologie, souligne que, dans la métropole marseillaise, 250 000 personnes sont exposées quotidiennement à des taux d’émissions polluantes supérieurs à la limite européenne. La cité phocéenne décroche ainsi la deuxième place dans le palmarès des villes les plus polluées de France, juste après Paris, et la première en termes de concentration de particules fines.

Comparatif des concentrations moyennes annuelles de particules fines. © Sophie Maréchal

Et les causes sont connues : « D’abord les voitures individuelles, puis le transport maritime, et enfin l’industrie pétrochimique de Fos-sur-Mer », détaille Florian Bessière, bénévole de l’antenne locale de Greenpeace. Relayée sur le site de l’organisation écologique, la Fédération Nationale des associations d’usagers des transports critique fortement la gestion de l’offre de transports en commun par la métropole : « Marseille fait 2,5 fois Paris en superficie. Il y a seulement deux lignes de métro et trois lignes de tramways certifiés “qualité” en hypercentre. […]  Quant au plan vélo, il est totalement indigent. [NDLR : la cité phocéenne compte 130 km de pistes cyclables, contre 740 km à Paris] »

L’association dénonce également l’attribution de parts conséquentes du budget à des projets routiers très polluants, comme par exemple le Boulevard Urbain Sud, ou encore le prolongement de la rocade L2, au détriment de modes de déplacements plus doux. Quant à la pollution liée aux transports maritimes, la région promet d’électrifier le Grand Port Maritime de Marseille d’ici quelques mois. Lors de la présentation des résultats 2018, vendredi 11 janvier, Christine Cabau-Woehrel, la patronne du Grand Port Martime, a également annoncé envisager un site pilote pour le branchement des porte-conteneurs à Fos. Mais pour l’heure, rien n’a été réalisé.

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© : Sophie Maréchal

A l’approche des élections municipales de 2020, Greenpeace Marseille espère mobiliser les élus sur cette question. « Nous leur avons envoyé une lettre fin février pour les alerter. On aimerait que la métropole réaffirme son engagement à créer une zone à faible émission de CO² et de particules polluantes [NDLR : une zone géographique où les véhicules les plus polluants sont interdits d’entrée ou soumis à un péage], et surtout qu’elle ne se concentre pas qu’autour du Vieux-Port. On ne veut pas d’une vitrine, pour être efficace, la zone doit être beaucoup plus étendue. Avec la campagne, toutes les personnalités politiques nous vendent du rêve. Mais on a peur que les belles résolutions ne se perdent après les élections », déplore Florian Bessière.

2700 morts prématurés par an à Marseille

La pollution de l’air causerait environ 2700 morts prématurés par an à Marseille, selon une étude d’Olivier Chanel pour le Comité régional d’éducation pour la santé Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Indigné face à ces chiffres, fin février, Florian Bessière a mené avec d’autres militants une action coup de poing visant à sensibiliser habitants et élus sur la qualité de l’air qu’ils respirent. A force de tags inscrivant sur les trottoirs « Marseille suffoque », les bénévoles ont mobilisé l’opinion publique locale. « On a fait près de 250 graffitis lavables à l’eau avec une soixantaine d’engagés. Le but, c’était de mettre en lumière le fait que la ville ne propose aucune alternative au transport individuel polluant. Il s’agit d’une urgence sanitaire et climatique », explique le jeune homme.

Pour interpeller les élus, le groupe Greenpeace Marseille a lancé une pétition qui leur est directement adressée. « L’idée c’est de leur dire : à vous de prendre le combat à bras le corps, car on ne peut plus respirer », s’insurge le militant éologiste.

En 2018, la Cour Européenne de Justice a lancé une procédure contre la France pour non-respect des normes de la qualité de l’air. A l’heure actuelle, la procédure n’a pas encore abouti. En cas de sanction, la France risque une amende de 11 millions d’euros et des astreintes journalières de 240 000 euros minimum, jusqu’à ce que les normes sur la pollution de l’air soient respectées.

Sophie Maréchal

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