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Les bodybuilders face au reconfinement : « Un fumeur a besoin de sa dose de nicotine, nous c’est l’entraînement »

Pascal Stepien (à droite) bodybuilder et coach sportif lors de sa dernière compétition IFFB en 2018.

Pousseurs de fontes, culturistes, ou bodybuilders, tous ces athlètes de l’esthétique ont fait de la musculation un mode de vie. Avec la crise sanitaire et la fermeture des salles de sports, ils ont dû se réinventer pour maintenir une préparation physique adéquate.

Plus qu’une discipline, le culte du corps est avant tout un mode de vie pour les bodybuilders qui ont fait de leurs corps, une performance. Entre une diète 100% contrôlée et une rigueur d’entraînement à la minute près, se préparer pour une compétition de culturisme nécessite plusieurs mois de préparation, voir même des années. Pour plusieurs de ces athlètes, se préparer en 2020 relève du parcours du combattant.
« Quand j’ai su que nous allions être reconfinés tout est tombé à l’eau, l’annonce était très difficile » raconte Fouad, 48 ans. Juste avant le reconfinement, cet athlète originaire de Marseille a tout de même réussi à se qualifier pour une compétition à l’international remportant la première place en catégorie Master (de 45 à 49 ans) au Grand Prix de France d’Occitanie pour la catégorie Bodybuilding. L’euphorie de la nouvelle est vite retombée à l’annonce du reconfinement et surtout, lorsque les salles de sport ont dû fermer à nouveau. « La musculation ce n’est pas qu’à la salle de sport mais lorsqu’on prépare une compétition c’est obligatoire. Pas de salle, pas de compétition » ajoute-t-il.

Entraînement en cachette

Impossible pour ces poids lourds d’envisager une préparation physique sans équipements adaptés. Depuis le 29 octobre, certains en viennent à jouer avec les autorités pour garder leur ligne et leur « bonne shape ».  « La seule façon de pouvoir s’entraîner correctement c’est de connaître des endroits qui font de la résistance. Tous les matins je vais m’entraîner dans une salle qui est ouverte clandestinement » confie Yohanne, marseillais lui aussi qualifié pour les compétitions à l’international après sa troisième place au Grand Prix de France d’Occitanie dans la catégorie Men’s Physique Senior, catégorie réglementée qui exige certains critères esthétiques (épaules larges, taille fine etc). Lors du premier confinement, il n’avait pas hésité à mettre le prix pour un entraînement « maison » de qualité. « J’ai investi 400€ dans une machine pour pouvoir m’entraîner correctement » explique-t-il avant d’ajouter : « un fumeur a besoin de sa dose de nicotine, et bien nous c’est l’entraînement ».

« La première semaine je sentais que j’allais déraper et manger n’importe quoi »

Nicolas Geffroy, culturiste originaire de Rouen a dû se résoudre à s’entraîner à la maison avant de trouver une salle privée. « A l’annonce du reconfinement, ça a d’abord été une semaine de questionnement, de découragement puis d’entrainement à la maison entre les jouets de mes enfants et la télévision » explique l’homme de 46 ans qui a organisé une vraie salle de sport dans son salon. En dehors du matériel c’est une vraie rigueur alimentaire que doivent tenir ces athlètes, à raison de 5 à 6 repas par jour sans excès dans des quantités pesées au gramme de protéines ou glucides près. En confinement, la tentation du craquage est omni-présente. « La première semaine, je sentais que j’allais déraper et commencer à manger n’importe quoi. Quand votre vie est articulée en fonction du bodybuilding, ne pas s’entraîner provoque un vide immense. On est perdu comme un enfant dans un magasin ». Depuis, Nicolas a décidé de lever le pied et a repoussé sa préparation de quelques mois après dix ans de compétition sans interruption.

Un matériel indispensable

Dans cette discipline très exigeante et en raison de la crise sanitaire, Pascal Stepien, coach sportif, bodybuilder et entraîneur personnel à Genève a commencé à adapter ses coaching en fonction du matériel de chacun.

« Je conseille de tenir la diète et l’alimentation à 200%, c’est la clé. Mais surtout, il faut continuer de pratiquer une activité physique » déclare le jeune homme. Malgré quelques dépenses dans des équipements pour s’entraîner chez soi, la limite est souvent atteinte. « Si les gens ont beaucoup de matériel ils peuvent progresser mais si les athlètes sont comme moi avec deux élastiques à la maison et deux poids de vingt kilos ils ne peuvent rien faire d’intéressant, c’est la misère » explique le coach.

Une motivation à toutes épreuves

Malgré l’absence des salles de sport et le reconfinement, ces bodybuilders pour qui « le tan » (autobronzant qui sert à mettre en valeur le corps des sportifs lors des compétitions) et les ambiances de concours sont devenues « une drogue » selon Nicolas Geffroy, la détermination reste la même. « Quand ma fille me dessine avec des gros biceps et des altères, c’est pour cela que je continue » confie-t-il. Lucie Favrelle, originaire de la Somme et qualifiée pour une compétition internationale au Portugal se dit quant à elle « toujours aussi déterminée à aller se mesurer aux autres ». À corps musclé, mental d’acier.

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