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Les gilets jaunes divisés tentent de s’organiser

La réunion entre le premier ministre et les gilets jaunes prévue mardi 4 décembre a été annulée, faute de représentants. Le mouvement peine à s’organiser au niveau national et local.

A Marseille, les gilets jaunes tentent aussi de s’organiser. © Facebook Gilets jaunes Marseille

Huit gilets jaunes étaient invités rue de Varenne, un seul était au rendez-vous. Les représentants ont reçu des menaces de mort de la part d’autres membres des gilets jaunes. L’ambiance est tendue dans le mouvement, divisé en deux et organisé à travers plusieurs groupes Facebook.

Les gilets jaunes « libres » et « citrons »

Dimanche 2 décembre, dix gilets jaunes ont signé une tribune dans le Journal du dimanche, intitulée « l’appel des modérés ». Ils souhaitent être les « porte-parole d’une colère constructive » et se nomment les gilets jaunes « libres ».

Parmi eux, Jacline Mouraud. Gilet jaune du Morbihan devenue personnalité publique avec sa vidéo « la traque aux automobilistes », vue plus de six millions de fois sur Facebook. Autre signataire, Benjamin Cauchy, gilet jaune occitan. Il est passé par le syndicalisme étudiant, un mandat local et le milieu de l’extrême droite. Ses motivations politiques ont été décriées au sein des gilets jaunes, qui l’ont depuis écarté. Le cadre toulousain a créé un mouvement politique appelé « Citrons ».

Ces deux figures médiatiques, discréditées par certains membres du mouvement, continuent d’être interrogées par les journalistes. Pendant l’émission spéciale sur France 2, diffusée dimanche 2 décembre, Jacline Mouraud était invitée en duplex. Laëtitia Dewalle, porte-parole des gilets jaunes du Val d’Oise, a critiqué en direct la signataire du JDD. « Il y a des gens qui ont envie de tirer la couverture médiatique à eux », lance-t-elle avant d’ajouter : « moi je suis derrière la lignée d’Eric Drouet et Priscillia Ludosky ».

Les gilets jaunes « officiels »

En réponse à la publication de la tribune du JDD, certains gilets jaunes ont créé un site « officiel » pour le mouvement. Eric Drouet et Priscillia Ludosky se sont fait connaître comme représentants « officiels », mais aucun vote n’a été organisé. Ils ont rencontré le ministre de la Transition Ecologique et Solidaire, François de Rugy, le 28 novembre dernier.

Eric Drouet est à l’origine de la première manifestation, le 17 novembre. Modérateur du groupe Facebook : « La France en colère !!! » où 222 855 membres peuvent s’exprimer, il s’est autoproclamé porte-parole national du mouvement. Chauffeur poids lourds, il publie une à deux fois par jour des vidéos tournées dans son camion, où il répond aux commentaires des internautes. Il a également créé une page « La France énervée » qui totalise 44 950 abonnés. Les informations sur les blocages circulent par ce biais. Le nombre et la taille de ces groupe ne cessent d’augmenter.

L’autre figure, Priscillia Ludosky, est l’initiatrice de la pétition « Pour une baisse des prix du carburant à la pompe » signée plus d’un million de fois. Elle a publié un communiqué sur Facebook pour critiquer le choix des personnes interrogées sur les plateaux : « pourquoi les médias […] invitent des personnes se disant porte-paroles et cultivent ainsi la confusion et le doute dans l’esprit des gens […] ».

Divisions locales

Des représentants au niveau local doivent être nommés mais à Marseille, la guerre des chefs divise aussi le mouvement.

Paul Marra est le porte-parole de la ville de Marseille. Il souhaite devenir le représentant régional des gilets jaunes. « J’ai des capacités oratoires, de communication et d’organisation », avance-t-il. Son second, Jean-Michel Durand explique : « c’est le premier à avoir parlé aux médias et c’est plus simple comme ça. Cela ne plait pas à tout le monde mais c’est un porte-parole, plus qu’un leader ».

Eric Fabrer n’est pas du même avis. Hier, proche de Paul Marra, il s’est opposé à ce qu’il appelle « la soif de pouvoir ».

On m’a supprimé du groupe Facebook des gilets jaunes de Marseille. C’est comme une dictature, si on n’est pas d’accord avec le chef on est éliminé, affirme le gilet jaune désormais électron libre.

Il songe à créer un autre groupe, de quoi brouiller encore un peu plus la représentation des gilets jaunes.

Raphaëlle TALBOT

Auteur·trice