Nouvelle version du décret anti-immigration : pourquoi Donald Trump fait face à un mur

US President Donald Trump attends a meeting about healthcare in the Roosevelt Room at the White House in Washington, DC, on March 13, 2017. / AFP PHOTO / NICHOLAS KAMM
Une fois n’est pas coutume, la nouvelle version du décret anti-immigration ne fait pas l’unanimité au sein des juges américains. Après deux mois de bataille judiciaire, le président des Etats-Unis ne veut pas lâcher l’affaire et décide de se pourvoir devant la Cour Suprême. Une ténacité ostensiblement vouée à l’échec.
A défaut de construire un mur entre son pays et le Mexique, Donald Trump se heurte à celui de la justice. Il faut dire que les juges américains exercent à merveille leur rôle de contre-pouvoir. Depuis l’annonce de la mise en place du décret anti-immigration, ils n’ont pas cessé de promulguer son interdiction. De quoi déclencher la colère du président des Etats-Unis sur son compte Twitter.
SEE YOU IN COURT, THE SECURITY OF OUR NATION IS AT STAKE!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 9 février 2017
Mais au fil du feuilleton judiciaire , la bataille de Donald Trump face à la justice a tourné à son désavantage. Si bien que le 16 février dernier, après la décision de la Cour d’appel de San Francisco de suspendre le décret, il décide de jeter l’éponge et de réécrire le décret. « Plutôt que de poursuivre ce litige en justice, le président a l’intention d’abroger son décret et de le remplacer par un nouveau décret, grandement révisé » précisent les avocats du gouvernement dans un mémorandum transmis à la cour. Chose dite chose faite, Donald Trump signe une nouvelle version le 6 mars, mais neuf jours plus tard, le décret est à nouveau contré par la justice américaine. A croire que le président américain ne sait pas à qui il a affaire…
L’immense pouvoir des juges fédéraux
Aux Etats Unis, le système judiciaire est divisé en deux. D’un côté la justice de l’Etat fédéral et de l’autre celle des états fédérés. La première prévalant sur la deuxième selon l’article VI alinéa 2 de la Constitution. C’est la raison pour laquelle les juges fédéraux ont des pouvoirs très étendus. La preuve, concernant le décret anti-immigration, ils ont la possibilité de rendre une décision à portée nationale et ainsi bloquer, à leur convenance, les actes législatifs qu’ils jugeraient attentatoires aux droits fondamentaux.
Parmi les différents paliers, ce sont les juges des cours d’appel qui détiennent le plus de pouvoir. Ils exercent en effet un rôle de juge de dernière instance si l’affaire n’est pas déférée devant la Cour suprême (en général 1% des cas).
En conséquence, leur nomination est primordiale, d’autant que contrairement à la France, la justice américaine est loin d’être neutre. Les juges nommés à vie par le Président des Etats-Unis ont une étiquette politique ouvertement connue. En début de mandat, Donald Trump ne s’est pas encore prêté à l’exercice. Il se retrouve de surcroît, face à une majorité de juges démocrates, Barack Obama n’ayant pas oublié d’exercer son devoir avant de partir.
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S’il est bien vrai que cette sensibilité politique joue un rôle dans la décision des juges, cela n’a pas empêché un juge républicain de première instance James Robart, de prendre une décision à l’encontre du décret anti-immigration. Donald Trump, acculé, n’a plus qu’une seule option : se tourner vers la juridiction suprême des Etats-Unis. « Nous allons nous battre (…). Nous irons aussi loin que nécessaire, jusqu’à la Cour suprême s’il le faut. Nous allons gagner » a t-il déclaré.
Échec annoncé devant la Cour suprême
La Cour suprême c’est un peu l’équivalent du Conseil Constitutionnel en France. Considérée comme la juridiction suprême du pays, elle est chargée de contrôler la constitutionnalité des textes et a la compétence de pouvoir trancher les décisions prises par les juges fédéraux.
Parmi les thématiques les plus importantes tranchées devant elle : la peine de mort, la ségrégation, le mariage homosexuel ou encore l’avortement. Sa composition est donc primordiale. Le président des Etats-Unis a le pouvoir de nommé les juges de la Cour suprême à vie, nomination qui doit être validée ensuite par le Sénat.
Les sénateurs se sont ainsi opposés à la nomination par Barack Obama du juge Merrick Garland après la mort d’Antonin Scalia, le 13 février 2016. Donald Trump, fraîchement élu a donc nommé Neil Gorsuch, un juge conservateur pro peine de mort.
Cette nomination fait donc pencher la balance côté conservateurs. La Cour Suprême étant composée actuellement de huit juges dont quatre dits progressistes. Pour autant, en ce qui concerne la bataille judiciaire actuelle, Donald Trump ne pourra pas encore compter sur cette supériorité numérique, Neil Gorsush ne pouvant pas prendre ses fonctions avant le feu vert du Sénat.
Virage à droite pour la Cour suprême américaine… par francetvinfo
Seule solution pour Donald Trump, réécrire une nouvelle fois le texte en retirant toute les mentions polémiques. Mais cela voudrait dire qu’il devrait admettre sa défaite. Une solution qui n’est pas gagnée d’avance.
Eline ERZILBENGOA