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Du mur de la honte au mur d’expression

À Marseille, « le mur de la Plaine » est  le symbole de la contestation des travaux de la place Jean-Jaurès. Décryptage de ce support d’expression hors norme.
Le mur est utilisé comme tableau d’affichage par certains collectifs. ©Facebook Céline Koko

En plein cœur de Marseille, un mur de plus de 2 mètres de haut entoure la place Jean Jaurès depuis fin octobre. Il est apparu pour assurer la tenue des travaux de rénovation de cette place, communément appelée « la Plaine ». Depuis l’arrivée des engins de chantier, ils sont plusieurs dizaines de manifestants à se rendre tous les jours sur lieux, notamment pour empêcher l’abattage des arbres. Ce mur est une décision de la municipalité face à la contestation. L’édification des pans de béton a eu pour effet d’attiser davantage la colère des « défenseurs de la Plaine ». Après multiples affrontements avec les CRS et des tentatives pour renverser les blocs de bétons, les manifestant ont trouvé un autre moyen de résister en utilisant le mur à leur avantage.

Il a été investi par les riverains et les artistes du coin. En quelques jours, les longs pans de bétons se sont transformés en support artistique : affiches, collages, écritures et surtout graffs et tags. Les artistes de rue sont très nombreux dans ce secteur puisque « le quartier des créateurs » n’est qu’à quelques mètres. Les graffeurs sont tellement actifs que l’aspect du mur change presque chaque semaine. Zoé est chercheuse en anthropologie. Elle effectue une recherche sur les écritures urbaines et pour elle, ce mur est « une aubaine de cas d’étude ». (cf diaporama ci-dessous)

Ce support d’expression hors normes a été installé en 3 jours et a coûté 390 000 euros. Une semaine plus tard, les immeubles de la rue d’Aubagne tombaient. Depuis, la cause des sinistrés du quartier de Noailles est aussi le combat des défenseurs de la Plaine. Les slogans et les affiches sur le mur ont pris une dimension contestataire plus marquée, plus radicale. Le maire Jean-Claude Gaudin, la gestion de la municipalité et « l’embourgeoisement du centre-ville » sont les premières cibles. Véronique vit sur la Plaine et elle désespère de voir ce mur tous les jours : « c’est très moche, même avec les tags… Mais c’est une manière de résister et c’est toujours mieux que de voir seulement du béton ». Les habitués du quartier devront prendre leur mal en patience, le mur disparaîtra à la fin des travaux, en 2020.

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Cassandre Amouroux

Auteur·trice