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Agriculture urbaine : « un poumon vert » dans les quartiers Nord de Marseille

La ferme Capri, lancée il y a deux ans à Marseille, fait pousser fruits et légumes au cœur des quartiers Nord. Entre rêve d’autonomie alimentaire et de ville future, le projet veut offrir aux habitants un autre champ des possibles, littéralement. 

Les légumes sont cultivés par les habitants du quartiers. Photo: Zoé Neboit

Aux pieds des hautes cités des Aygalades, l’A7 et ses milliers de voitures fendent avec vacarme les quartiers Nord. Mais de l’autre côté de la grise autoroute du soleil, se trouve un petit hectare où poussent figuiers, courges et choux biologiques. 

Sortie de terre en avril 2021, sur un ancien terrain vague, la ferme urbaine Capri veut « produire et nourrir ici, dans le 15e arrondissement », explique Isaac, le maraîcher. Un objectif qui paraît aller de soi pour une modeste ferme. D’ailleurs on y parle fumier, amendements et plantations comme dans toutes les autres.

Exploitation modèle

Pourtant, c’est l’un des projets phares du plan de financement « Agriculture urbaine » de la Métropole Aix-Marseille, lancé en 2019 pour 2,1 millions d’euros. L’objectif de cette exploitation modèle, montée par l’association marseillaise la Cité de l’agriculture est d’entamer pas à pas « une transition écologique alimentaire », selon Elise Pasart Chaintrier, responsable accueil et médiation. 

Longtemps laissé à l’abandon, le terrain est situé sur l’ancienne ceinture maraîchère de Marseille. Photo: Zoé Neboit

Au XIXe siècle encore, Marseille était autonome dans sa production de fruits et légumes: une large ceinture maraîchère périurbaine suffisait à nourrir ses habitants. Dans les années 1960, la quantité d’espaces cultivés s’effondre en faveur d’une forte urbanisation.

Face aux enjeux climatiques et géopolitiques, ce modèle est remis à l’ordre du jour comme l’atteste le plan d’actions en faveur de la souveraineté alimentaire annoncé par le département et la Métropole Aix-Marseille-Provence en mai dernier. L’observatoire de l’association française professionnelle d’agriculture urbaine (Afaup) dénombre actuellement 406 fermes urbaines en France (hors jardins et potagers). C’est 400 de plus qu’en 2013. Loin d’être l’utopie d’une poignée de rêveurs, « derrière nous, il y a une vraie volonté des politiques publiques » renchérit Elise.

Les produits sont proposés à des prix abordables – 1,50€ la botte de poireaux ; 1,80€ pour une courge – et sont vendus sur place tous les mercredis. Ils sont également présents sur les étals d’épiceries solidaires, « mais toujours dans les quartiers Nord ! » tient à préciser Isaac. Le reste s’écoule dans le circuit associatif local, par exemple dans les cuisines de l’Après M, ancien McDonald’s transformé en cantine sociale. Un choix qui n’est pas anodin: dans les quartiers Nord, 5 % des enfants sont obèses et 18 % en surpoids, contre 3,3 % et 13,5 % dans le reste de la ville selon l’agence régionale de santé.

Isaac et Mélanie assurent la vente sur place une fois par semaine. Photo: Zoé Neboit

« On est entouré d’autoroute, c’est vrai, mais on s’en fout. »

Des bénévoles plus ou moins expérimentés s’affairent sur la ferme. Giai, employé d’une usine proche, s’occupe de récolter des choux kale avec minutie. « J’apprends », souffle ce Vietnamien de 55 ans qui parle peu Français. À quelques pas, Julien suit les conseils de Mélanie, apprentie en agronomie.

La ferme Capri est le « poumon vert » de Monique, retraitée qui aime y flâner et faire son marché. Ateliers, initiation au jardinage, jeux de piste… Elle est aussi un terrain de jeux et d’apprentissage pour les enfants du quartiers. À force de s’y rendre plusieurs mercredis de suite Cali, six ans, connaît ses recoins par cœur : « J’aime bien voir les grosses plantes avec les couleurs violettes là-bas. » Sa grand-mère Françoise conclut : « On est entouré d’autoroute, c’est vrai, mais on s’en fout. » 

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Zoé Neboit

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