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De Twitter à TikTok, les candidats tchatchent les jeunes

Pour séduire les plus jeunes électeurs, les candidats à la présidentielle sont de plus en plus présents sur les réseaux sociaux. Crédit photo: Maxime PERNET

Ultra prisés par les jeunes, ils sont envahis par les contenus politiques avec un seul but : trouver de nouveaux électeurs. Leur impact sur les intentions de vote n’est pourtant pas si évident.

« Je ne regarde pas la télé. Je m’informe surtout via Facebook. Dans mon fil, j’ai régulièrement des propositions d’information ». Comme Nasna, étudiante Marseillaise de 24 ans, de plus en plus de jeunes délaissent les médias traditionnels pour s’informer sur les réseaux sociaux. Et les élections présidentielles ne font pas exception.

Selon l’étude Harris Interractive publiée ce début février, c’est même le premier moyen d’information des jeunes entre 16 et 25 ans, utilisé par 73% d’entre eux. La radio et la presse écrite se retrouvent bien loin dans le classement, respectivement à 52 et 48%. Seule la télévision sauve la presse traditionnelle, réussissant l’exploit d’être à égalité avec les réseaux sociaux. Plus rapide, plus pratique, ces derniers ont largement convaincu les plus jeunes, d’autant plus qu’ils ont un autre argument : leur gratuité. « On n’a pas les moyens de payer. Alors que là en deux clics c’est fait », confie Eléa, étudiante en 2ème année de droit à Marseille.

« Le problème aujourd’hui n’est pas de s’exprimer mais d’être entendu »

Si leur utilisation massive est indéniable, ont-ils réellement un impact sur les jeunes électeurs ? « Il m’est déjà arrivée de tomber sur des extraits de Le Pen où elle paraissait géniale, alors que je suis contre les idées de son programme », poursuit Eléa. La raison : les vidéos courtes, d’une vingtaine de secondes, que les candidats font circuler en masse sur Facebook, Instagram, ou encore TikTok. Des extraits bien choisis, parfois à l’opposé de la communication traditionnelle. Comme Jean-Luc Mélenchon qui partage sur son TikTok les meilleurs extraits de ses meetings, généralement accompagnés d’une « punchline », une phrase choc et rassembleuse. Mais c’est aussi l’occasion de se montrer plus humain et proche des électeurs, comme Marine Le Pen qui partage son sapin de Noël et ses chats ou encore Eric Zemmour qui poste des extraits de ses rencontres avec des citoyens. Le but n’est pas tant de susciter un débat de fond sur l’idéologie du candidat, mais d’attirer la curiosité des utilisateurs en le présentant sous un angle différent. « Quand tu es un parti minoritaire, soit tu réagis à l’actualité, soit tu es le premier à avoir une idée innovante », analyse Antonin Dacos, co-référent du pôle communication des Jeunes avec Jadot.

Mais le lien n’est pas toujours aussi simple. En 2017, le candidat de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon excellait dans cet exercice de communication. Multipliant les interventions sur tous les réseaux sociaux, il était ainsi suivi par des centaines de milliers de followers mais n’ira pas au second tour. Il continue en 2022 en diffusant régulièrement des meetings et autres contenus exclusifs sur Twitch, ou encore sur sa chaîne TikTok suivie par 1.4 millions de personnes. Pourtant cela ne l’empêche pas de stagner à 10,5% dans les sondages d’intentions de vote, bien loin d’Emmanuel Macron crédité de 25% des suffrages. « Le problème aujourd’hui n’est pas de s’exprimer mais d’être entendu », analysait en 2017 le politologue et chercheur au CNRS Thierry VEDEL.

Sur Instagram Jean-Luc Mélenchon partage sa nouvelle paire de lunettes. Capture d’écran

Au-delà d’être entendu, l’enjeu pour les candidats est de l’être auprès de personnes qui ne sont pas déjà acquises à leur cause. « On est conscient de la bulle de filtre sur les réseaux. Sur Twitter il y a beaucoup de journalistes et de militants, mais moins d’électeurs à convaincre », détaille Antonin Dacos. Pour la Saint-Valentin, ils ont ainsi créé des comptes à l’effigie de Yannick Jadot sur l’application de rencontre Tinder, pour ensuite amorcer une discussion sur les idées du candidat écologiste et pousser les jeunes à aller voter. Selon eux, à la mi-journée plusieurs dizaines d’adhésions supplémentaires ont été constatées. Mais le succès n’est pas toujours au rendez-vous. « Pour 10 idées, 9 ne marchent pas. C’est assez imprévisible », concède-t-il.

En d’autres termes, les jeunes ne sont pas des éponges qui absorbent des paroles sans faire preuve d’esprit critique. « Cela peut m’influencer à aller voir d’autres vidéos du candidat », reconnaît Camille, 22 ans, étudiante en BTS commerce international avant d’ajouter : « aller faire des recherches sur internet » s’il a su piquer sa curiosité. Et ce, quand ils regardent le contenu en entier. Car ils n’hésitent pas à « swiper », c’est-à-dire passer immédiatement à autre chose quand ils tombent sur du contenu politique. « Les réseaux sociaux, c’est pour la détente, la politique c’est secondaire », souffle-t-elle.

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