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Le journal école du master journalisme de l'EJCAM

La solidarité, le nouvel ingrédient marseillais pour mieux trouver un travail

Un restaurant solidaire qui permet l'insertion.

En plein cœur de Marseille, un restaurant gastronomique a trouvé une idée originale pour répondre à la galère du manque de main d’œuvre dans la restauration. Le concept : des repas à 1€ pour les plus démunis concoctés par des cuisiniers en insertion formés à l’excellence par un chef étoilé.

Un restaurant solidaire qui permet l’insertion. @Le République

Imaginez une des plus belles salles près du Vieux-Port à Marseille, avec dorures au plafond et piliers à l’ancienne.
C’est là que se côtoient toutes les couches de la population, des plus aisés aux plus démunis, pour partager leur repas autour de la même table. Le République, c’est le pari d’un chef étoilé et d’un jeune start-upper pour réunir Marseille autour d’un même repas.

Au menu, dorade poêlée avec ses petits légumes. Un plat deux étoiles concocté par un groupe d’hommes et de femmes jusqu’à maintenant très éloignés du monde du travail. L’objectif à travers ce restaurant solidaire ?

Créer de l’insertion sociale et professionnelle autour des métiers de la restauration.

300 000 emplois disponibles dans la restauration

« Il existe une nouvelle façon de faire de la restauration ». C’est l’ambition de Sébastien Richard, chef étoilé et Sylvain Martin ancien start-upper.

Leur déclic est parti d’un constat simple : « On était pendant le confinement et Sébastien travaillait à Courchevel, raconte Sylvain Martin. Il redescendait souvent à Marseille pour offrir des repas au personnel soignant durant la dure période de la pandémie. Et pour lui, le contraste entre les deux types de personnes qu’il servait lui a frappé aux yeux. Il comprend qu’il n’y a pas de restaurant où les gens puissent se mélanger ».

Avec 300 000 emplois non pourvus actuellement dans le secteur de la restauration, le vice-président de l’association Le petit Lili porteuse du projet avait pour ambition de prouver qu’il existe une nouvelle façon de faire de la restauration.

« Avec Sébastien Richard, on est aussi partis d’une problématique qu’il rencontre sans cesse en tant que professionnel : le manque de main d’œuvre qualifié ».

Alors, dans une métropole où le taux de chômage de plus de 15%, le double de la moyenne nationale, faire redécouvrir ces métiers a semblé essentiel pour ce duo : « On constate que la restauration n’est plus un métier qui attire et c’est dommage. On essaie de combler cela à notre petite échelle ».

Redonner un sens à son métier

Dans la chaleur des fourneaux, on retrouve Samir. La distance entre ce jeune de 23 ans et l’emploi se mesure aux dizaines de kilomètres à parcourir chaque matin et soir.

« Je n’ai pas de voiture, les transports en commun à Marseille, c’est la m***e. Ici, on a un convoi organisé par l’IAE. On est remboursé dans nos transports. Les horaires sont flexibles. Il font vraiment attention à ce qu’on soit bien. Ça fait du bien d’être dans un environnement qui nous comprend.»

Cette double insertion – sociale et professionnelle – fait vivre chaque jour « 12 collaborateurs en insertion professionnelle sur 22 employés ».

Le recrutement se fait grâce à un partenariat avec l’IAE de Marseille. L’objectif pour Sylvain Martin : faire redécouvrir ce métier passion au plus grand nombre.

« On essaie de former les personnes en les prenant sous notre aile, explique-t-il. On les forme au métier de cuisinier mais aussi de métier de salle. Ce sont des métiers exigeants et qui semblent être éloignés du type d’emplois proposés à ces jeunes. Avec cette initiative, on leur dit que c’est possible d’apprendre à faire de la cuisine, de l’excellente cuisine ».

Aux fourneaux, au milieu du ballet incessant des assiettes entre la cuisine et la salle, on rencontre Karim. Il y a un an de cela, Karim n’avait jamais touché une casserole.

« J’ai été au chômage pendant près de 3 ans. Et dans ces moments-là où on enchaine les refus, on perd un espoir et de la motivation. Là, je suis heureux. J’apprends tous les jours, je sais que je fais ça pour une bonne cause. C’est bien ce qu’ils ont créé. Il faudrait plus de lieux comme ça ».

« Aller au-delà de la simple main tendue »

Ce restaurant solidaire n’est pas seulement un tremplin pour ces jeunes travailleurs plein d’espoir, c’est aussi un moyen de s’insérer dans le marché du travail durablement.

« Soit à l’issue des quatre mois de formation, ils sont suffisamment à l’aise pour aller postuler dans un restaurant, explique Sylvain Martin, avec l’idée qu’on travaille en amont avec des partenariats avec des restaurateurs – soit ils peuvent nous dire qu’ils se sentent fragiles et dans ce cas-là on les accompagne vers de vraies formations qualifiantes ou on les garde auprès de nous et on les intègre dans notre équipe ».

Mais dans tous les cas, Sylvain assure que cette expérience même temporaire ne peut être que bénéfique : « Les bases qu’on leur aura apprises, que ce soit la rigueur, la ponctualité, l’hygiène seront de choses réutilisables dans d’autres expériences ».

Et pour l’instant, ça marche : « Sur 15 personnes en insertion, la moitié de l’équipe de départ est encore là, dont certains sont montés en compétence ».

Pour le moment, le restaurant croule sous les demandes d’embauche. « On aimerait en
embaucher plus mais là ça ne dépend plus de nous. On espère que les collectivités et la région puissent s’inspirer de notre projet ».

Le restaurant Le République attire chaque jour une centaine de clients. Un succès tel que le restaurant voit plus grand. Afin de consolider cette vision de l’insertion, Sylvain Martin ambitionne de créer « structure commune » avec La Varappe , l’une des plus grandes entreprises d’inclusion sociale en France, qui permettra de décliner les différents concepts du République dans d’autres villes en France.

Un projet qui mijote depuis un moment, et dont on devrait connaître les détails d’ici quelques mois.

Auteur·trice
Manale Makhchoun

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