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S’inquiéter de l’invisible

La mer Méditerranée est à l’origine de 20% de la production marine dans le monde, alors qu'elle ne représente que 1% de la surface océanique mondiale. / Crédit : Louis Rengard

L’eau est notre ressource la plus précieuse. En voilà une banalité à écrire qui n’a pourtant jamais été démentie. Car sans eau, plus de vie sur Terre. L’océan absorbe près de 30% des émissions de CO2 et produit la moitié de l’oxygène respiré par chaque être humain. Sécheresse, réchauffement, fonte des glaces, pollution plastique, destruction des fonds… Le dérèglement climatique met en danger cette ressource vitale.

Pourtant, le thème de l’eau peine encore à s’affirmer dans le débat public. L’eau ne passionne ni les foules, ni les médias et, donc, encore moins les politiques. Le malheur de l’océan est qu’il ne polémique pas à longueur d’émission télé et à coup de déclarations chocs dans des tweets bien sentis. Il souffre en silence et cache ses plaies sous cette immense nappe bleutée et mystérieuse. Les scientifiques ont cartographié la totalité des surfaces lunaire et martienne, mais seulement 20% de nos fonds marins. Et bien que la fonte des glaciers renvoie de nombreuses images spectaculaires, ce désastre écologique ne reste que cela pour la majorité : des images.

La mer la plus polluée au monde

Ces enjeux ne sont pas seulement planétaires, mais locaux. Si la mer Méditerranée ne représente que 1% de la surface océanique mondiale, elle est à l’origine de 20% de la production marine du monde. En 2017, on estimait à 450 milliards de dollars sa production économique annuelle. Des résultats dus à la richesse – et donc à l’importance – immense de ce territoire. Mais comme pour toute surexploitation, celle-ci entraîne une destruction progressive du milieu. Avec des concentrations quatre fois plus élevées de microplastiques au km² que le 7e continent, elle serait la mer la plus polluée au monde.

Mais en parler requiert de s’intéresser à ce qu’on ne voit pas. La pollution sonore en premier lieu, est encore mal comprise. Alors qu’elle désoriente grandement les mammifères, elle n’entraîne aucune réglementation contraignante. Pour protéger cet écosystème, l’Etat et les collectivités locales mettent en place des Aires Marines Protégées en Méditerranée. Mais ces zones de protection manquent cruellement de moyens et apparaissent souvent comme de simples traits sur une carte. À Marseille, les aberrations ne manquent pas. La ville et ses alentours sont tellement pollués que les plages sont obligées de fermer par temps de pluie. Sous l’eau, une algue créée par la pollution étouffe la biodiversité et fait des dégâts considérables. Même les Calanques, pourtant une précieuse richesse patrimoniale mondiale, ne sont pas à l’abri. Une station d’épuration s’y déverse toujours et les locaux se rappellent encore du scandale dit “des boues rouges”, des déchets rejetés en pleine Calanque par l’usine Alteo. De plus, la surfréquentation de la zone dégrade, imperceptiblement du grand public, ce trésor naturel. Le parc cherche des solutions et notamment pour limiter le nombre de visiteurs chaque année. Pour saisir l’importance de ce qui se joue en Méditerranée, il faut scruter l’invisible.

Louis Rengard

Auteur·trice
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