Elections : qu’attendent les féministes ?

Les collectifs féministes militent pour que le décompte soit élargi à toutes les femmes assassinées, et plus seulement dans le contexte conjugal.Crédits photo : Mika Baumeister by Unsplash.
Le féminisme: un non-sujet dans cette campagne présidentielle ? C’est le constat que font certains collectifs féministes, comme Osez Le Féminisme et les Colleureuses de Marseille. Elles se plaignent de l’absence de mesures pour faire avancer la cause des femmes dans les programmes politiques. Les militantes de Collages Féministes tentent alors de se réapproprier l’espace public pour visibiliser leur lutte, et le collectif Osez le Féminisme propose 12 mesures pour faire avancer politiquement le droit des femmes. Pour elles, le féminisme est un enjeu crucial, surtout à Marseille où les violences physiques et sexuelles ont explosé de 20,8% en 2021 par rapport à 2019. L’avis des Marseillaises interrogées sur cette question est le même: il y a un décalage entre l’importance du féminisme, et l’absence de débat politique sur le sujet.
Quelles sont les attentes des militantes féministes à Marseille par rapport à cette présidentielle ?
Le collectif Collages Féministes de Marseille s’est initialement créé pour lutter contre les féminicides. Leurs préoccupations se sont rapidement étendues à d’autres questions concernant le droit des femmes: l’IVG, les inégalités salariales, le droit à disposer de son corps, entre autres.
L’urgence, au niveau politique? “Que les candidats à l’élection s’emparent de la question des violences masculines faites aux femmes, qu’elles soient physiques, psychologiques ou sexuelles”, tranche Marion Breel, 35 ans, une Colleureuse (écriture inclusive pour “colleuse”) de Marseille. Cette attente est particulièrement ressentie à Marseille, où les violences physiques ont augmenté de 20,8% en 2021, par rapport à 2019, et parmi elles, les violences sexuelles.
L’égalité des salaires et la parité dans le monde professionnel et politique sont les autres préoccupations des Colleureuses Marseillaises. « Ce sont de grands axes qui permettraient d’avancer vers une cause juste et plus égalitaire », estime Marion.
Le féminisme, un enjeu politique? Pour Marion, c’est un “non-sujet”:
Le collectif Osez Le Féminisme, lui a créé un féministomètre Les militantes scrutent les programmes et meetings des politiques pour les classer, du plus mysogine au plus féministe. En tête des primaires écologistes, Sandrine Rousseau arrivait en tête avec un programme libellé “féministe” par le collectif. Chez Les Républicains, Valérie Pécresse obtient la mention “peut mieux faire”. En plus de leurs analyses, OLF mentionne également 12 mesures-phares pour lutter contre les inégalités. Elles ont d’ores et déjà prévu des entretiens avec tous les partis pour leur exposer leurs mesures. Elles espèrent ainsi les faire adopter à une majorité de candidats.
L’élection d’un nouveau président ou présidente pourrait-elle faire évoluer la cause féministe?
Osez Le Féminisme a entrepris de proposer aux candidats une liste d’idées concrètes à inclure dans leurs programmes politiques.
Laetitia Couvé, une des porte-parole du collectif, nous explique:
Violences de genre, pédocriminalité, IVG, éducation sont autant de sujets évoqués dans les mesures qu’Osez Le Féminisme tente de faire inclure dans les programmes des candidats à la présidentielle. Elles ont ainsi instauré 12 mesures phares pour l’égalité. Nous avons choisi de vous parler de deux d’entre elles.
- Un milliard d’euros pour lutter contre les violences conjugales.
“On essaie de se rapprocher de ce qui est déjà fait en Espagne. En France on est loin d’atteindre les un milliard d’euros.” Laetitia regrette qu’à chaque étude, le nombre de violences conjugales restent le même.
- L’imprescribilité des crimes sexuels sur mineurs et la reconnaissance de l’amnésie traumatique.
Aujourd’hui en France, les crimes sexuels sur mineurs sont prescriptibles jusqu’à 30 ans après la majorité de la victime. Laetitia explique : “Quand une femme a vécu des violences sexuelles étant enfant, très souvent elle ne peut en parler que bien plus tard.”
Le collectif souhaite également faire reconnaître l’amnésie traumatique. L’amnésie traumatique c’est quoi ? Il y a peu de connaissances sur le sujet. Elle est plutôt courante chez les victimes ayant subi des abus sexuels quand elles étaient enfants. L’action qui se passe est tellement inacceptable que le cerveau se met en pause ou concentre son attention ailleurs. “Le problème c’est qu’on le leur reproche quand elles portent plainte ou lors des procès,” souligne Laetitia.
Pour connaître toutes les 12 mesures proposées par Osez le Féminisme, c’est par ici.
Qu’attendre d’un nouveau président ou présidente pour lutter contre les violences de genre?
La lutte contre les violences sexistes est le cheval de bataille des collectifs féministes à ses débuts. La médiatisation du sujet, la hausse des féminicides (146 femmes en 2019 en France, une hausse de 21% par rapport à l’année précédente) et la libération de la parole suite au mouvement #MeToo ont entraîné de nouvelles formes de militantisme, comme les Collages Féministes.
Ce qu’il y a d’urgent à faire, selon Marion Breel, c’est de changer de point de vue: “On demande aux femmes d’appeler le 3919, mais on ne s’adresse jamais aux hommes. On apprend aux femmes à se défendre, on n’apprend pas aux hommes à calmer leurs violences”.